Fusion nucléaire : lancement officiel du projet Spektre

29 octobre 2025

©Unys/Nicolas Dohr

L’Institut Jean Lamour (CNRS/Université de Lorraine) a officialisé le lancement du projet de recherche Spektre. Il se concrétise par un équipement destiné à l’étude des plasmas magnétisés, qui permettrait de rendre exploitable la fusion nucléaire comme une énergie décarbonée et abondante.

Il s’agit de l’aboutissement d’un travail débuté dans les 1970 sur la fusion nucléaire à l’Institut Jean Lamour. En septembre a eu lieu le lancement officiel du projet Spektre, porté par Étienne Gravier, professeur à l’Université de Lorraine, et Frédéric Brochard, directeur de recherche CNRS. Il s’agit d’un grand équipement de recherche destiné à étudier les plasmas magnétisés dans des conditions proches de celles rencontrées dans les réacteurs à fusion nucléaire. « Tout a commencé par un constat : il manquait un équipement d’expérimentation de taille intermédiaire, s’intégrant entre le laboratoire et les grandes installations, déclare Frédéric Brochard. En 2019, nous avons eu l’occasion d’acquérir 13 bobines de cuivre de seconde main en provenance de l’institut Max Planck de physique des plasmas. Cela nous a permis de construire cette machine pour un investissement de 600 000 euros, alors qu’elle aurait coûté plusieurs millions d’euros à neuf. »

Plusieurs axes de recherche

La fusion nucléaire consiste à faire associer des noyaux atomiques légers (hydrogène) pour former de l’hélium tout en dégageant de l’énergie. À l’inverse à la fission nucléaire d’atomes lourds comme l’uranium, ce principe présente plusieurs avantages déterminants, comme l’explique Frédéric Brochard : « Contrairement à l’uranium, l’hydrogène est un combustible très abondant sur Terre. De plus, la fusion nucléaire ne génère pas de déchets radioactifs à longue durée de vie, et il s’agit d’une réaction intrinsèquement sûre, ne générant aucune réaction en chaîne. ». Dans le cadre du projet Spektre, la machine permettra d’étudier un plasma aux propriétés proches de celles du plasma de bord d’un tokamak. Les équipes de recherche vont se pencher sur trois principaux volets : le chauffage du plasma ; l’étude de l’interaction entre plasma et parois ; et les phénomènes de turbulence liée aux gradients de pression et de température. « Dans le détail, nous souhaitons optimiser le procédé de chauffage par injection d’ondes pour porter le plasma à une température de 150 millions de degrés Celsius. De plus, nous voulons améliorer la résistance des parois des réacteurs pour un fonctionnement 24 h/24, notamment en testant des parois en métal liquide, précise Frédéric Brochard. Sur le volet des turbulences, nous souhaitons mieux comprendre le phénomène en vue de mieux le piloter par un outil d’intelligence artificielle. » Outre les trois principaux axes, un autre volet de recherche porte sur le diagnostic, en développant et en validant des modèles théoriques et expérimentaux. « L’idée est de pouvoir créer un jumeau numérique pour pouvoir améliorer notre compréhension du plasma, permettant ensuite d’optimiser la conception des futurs équipements de fusion nucléaire », indique Frédéric Brochard. Si l’équipement a été officiellement dévoilé, son lancement opérationnel est programmé pour mars prochain. « Une amélioration ultérieure de la configuration magnétique de cet outil est prévue, pour laquelle nous sommes en phase de recherche de financements », ajoute Frédéric Brochard.

Un outil de formation et de rayonnement

Outre la recherche, la machine du projet Spektre va servir à la formation initiale et continue. « L’équipement permettra de former les futurs ingénieurs et chercheurs devant acquérir des compétences et un savoir-faire sur la fusion nucléaire », rappelle Frédéric Brochard. Grâce à cet équipement d’appui de la recherche de premier plan, l’Institut Jean Lamour sera en mesure de nouer de nouvelles collaborations de recherche. « Nous avons déjà des projets collaboratifs de recherche avec le CEA, en France, et l’Institut Max Planck, en Allemagne. Cet outil va nous aider à monter des programmes avec des partenaires internationaux, notamment au Japon et aux États-Unis », conclut Frédéric Brochard.

Les partenaires du projet Spektre
– La Fédération de recherche fusion par confinement magnétique
– L’institut Max Planck de physique des plasmas
– L’Agence nationale de la recherche
– L’Université de Lorraine
– Le CNRS
– La Métropole du Grand Nancy
– Initiative d’excellence Lorraine (ex-LUE)

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