Les start-up de la watertech veulent modéliser l’eau

Crédit photo : Dinhill On
Le 24 juin a eu lieu une Matinale POC Média sur les watertech au sein des locaux d’Hydropolis à Montpellier. L’événement a permis de découvrir une sélection de projets de recherche et de start-up deeptech positionnés dans le domaine des sciences de l’eau. Une grande majorité portait sur la modélisation des bassins versants, cours d’eau ou encore précipitations. Retour sur les travaux les plus marquants.
C’est au sein du bâtiment Hydropolis, centre de recherche montpelliérain dédié aux sciences de l’eau, qu’a eu lieu la première Matinale POC Média délocalisée en Province. Ayant réuni une quarantaine de personnes en physique et une centaine en ligne, cet événement a mis en lumière plusieurs projets de recherche et d’innovation dans les technologies de l’eau.
Cartographier par le numérique
Dans la session de pitchs par différents porteurs de projets, une série de travaux concerne les modélisations numériques de cartes hydrologiques. Dans ce cadre, l’UMR G-EAU (Inrae/CIRAD/IRD/AgroParisTech/Montpellier SupAgro) a détaillé les travaux de son projet Explore 2. « Il s’agit d’un outil de modélisation hydrologique pour évaluer les différentes ressources en eau (potable, pour l’irrigation agricole, etc.). Nous nous sommes appuyés sur un outil open source dénommé airGRiwrm de gestion des ressources hydriques qui tient compte de l’influence humaine, en particulier sur les restrictions d’usage », précise David Dorchies, ingénieur de recherche Inrae à l’UMR G-EAU. Cet instrument a notamment été utilisé dans le cadre du projet Talanoa, qui visait à étudier la demande en eau du secteur viticole sur le bassin versant de l’Aude. « Nous avons pu modéliser une carte en fonction de la demande en eau, de l’économie, des restrictions d’usage et même des projections climatiques », poursuit David Dorchies.
Toujours en matière d’outil de modélisation, la start-up Blue Mapping a présenté sa solution de modélisation du ruissellement des eaux. « Ces phénomènes de mise en mouvement rapide peuvent être à l’origine de catastrophes naturelles, avec un impact sur les sols et un déplacement de polluants. Avec le changement climatique, cela risque de s’accentuer, il est donc nécessaire d’anticiper », détaille Alexandre Bredimas, CEO de Blue Mapping. La start-up propose une solution SaaS (Software as a service) qui permet de déterminer les effets de ruissellement des eaux à une échelle d’une zone de plus de 100 km², et ce, avec une haute résolution (de 1 à 5 m). Cet outil contribue ainsi à la réalisation de prévisions, qui peuvent servir à différents secteurs, parmi lesquels le secteur du traitement de l’eau, de la gestion des infrastructures de transport (ferroviaire ou routières) ou encore de l’aménagement urbain.
Dans le cadre de cette session de pitchs, l’Inrae a présenté son projet A3P dédié à la modélisation d’un cadre dynamique des prélèvements agricoles. « Il y a un triple défi pour notre outil : il faut à la fois tenir compte de la cartographie des cultures, des conditions météorologiques et des assolements pour prévoir la demande en eau, en confrontant la demande en eau et le gisement de ressources hydrologiques », explique André Chanzy, chercheur à l’Inrae au sein de l’UMR Emmah (Environnement méditerranéen et modélisation des agrohydrosystèmes).
La première session de pitchs s’est terminée par une présentation de l’outil commercialisé par Albedya. Il s’agit d’un logiciel SaaS conçu pour l’étude environnementale (hors carbone), capable de modéliser les systèmes énergétiques sur des bâtiments. « Nous pouvons, par exemple, déterminer, à l’aide de nos modèles, le point d’origine solaire sur un bâtiment en vue de l’installation de panneaux photovoltaïques », détaille Aymeric Bemer, CEO d’Albedya. Avant de poursuivre : « Notre outil dispose d’un volet “eau” qui permet de cartographier l’imperméabilisation des sols liée au ruissellement et le taux de récupération des eaux pluviales. »
Des technologies pour la qualité de l’eau
Dans le cadre de la Matinale POC Média, des solutions technologiques pour évaluer et améliorer la qualité de l’eau ont été présentées. C’est le cas de Green Solutions qui a détaillé ses procédés WaterVital et EcoSorb qu’il commercialise sur le marché français. WaterVital permet d’améliorer la qualité de l’eau par le principe de résonance moléculaire. « Cette technologie permet d’adoucir de l’eau sans utiliser de produits chimiques. Elle concerne différentes applications, comme l’assainissement, l’imprimerie, le chauffage, la climatisation ou, encore, l’alimentation », explique Michel-Paul Correa, business developer manager chez Green Solutions. La société a également présenté son produit EcoSorb, un polymère superabsorbant sans sodium ni acrylamide capable d’aider à l’hydrorétention. « 100 g d’EcoSob sont en mesure de stocker jusqu’à 30 l d’eau sous forme de gélatine. Ce qui permet de mieux gérer les besoins en eau pour les cultures », indique Michel-Paul Correa.
De son côté, la start-up IsoFind a présenté sa solution de traçabilité environnementale des polluants par analyse isotopique. « Chaque polluant possède une empreinte unique, que l’on peut analyser avec des isotopes du carbone (13 et 14). Nous proposons de mieux les détecter en analysant leur masse moléculaire », explique Carlos Heredia Aguila, CEO d’IsoFind. Disponible commercialement en 2025, la start-up entend apporter sa solution aux collectivités territoriales, aux agences de l’eau, aux industriels et aux bureaux d’études pour le suivi environnemental des gisements d’eau.
Lors de la session de pitchs, l’entreprise FerOTech a détaillé sa solution de traitement physico-chimique du phosphore. « Nous avons développé un adsorbant à base de fer (FeCl3), un élément abondant sur Terre et que l’on peut récupérer dans les sous-produits industriels. Ce produit permet de traiter les eaux usées sur des unités de petite capacité », indique Pauline Lanet, CEO de FerOTech. Dans le détail, le procédé breveté se présente sous la forme de deux réacteurs, l’un rempli d’adsorbants de fer et d’un filtre à sable.
Enfin, la dépollution des PFAS est un enjeu majeur dans le traitement de l’eau. Sujet sur lequel deux projets ont été présentés lors de la session de pitchs de la Matinale POC Média. D’une part, nous avons la société CleanEau qui a développé un matériau poreux et réutilisable pour filtrer les PFAS. « La technologie est fondée sur une résine composée d’un macrocycle et d’un polymère bifonctionnel qui a été structuré par méthode d’impression 3D ou UV », précise Mona Semsarilar, CEO de CleanEau. Pour l’heure, les tests sont concluants sur la rétention d’iodine et la dépollution d’autres composés va être étudiée : métaux lourds, lithium, césium, etc.
D’autre part, la société Grapheal a dévoilé sa solution à base de graphène pour détecter les PFAS dans l’eau. « Notre technologie s’appuie sur un dispositif électronique qui fait appel à une réaction de réduction du méthane sur un polymère fonctionnalisé. Le test a d’ores et déjà été concluant sur des effluents industriels », souligne Vincent Bouchiat, CEO de Grapheal. Cette technologie à base de graphène constitue une alternative aux systèmes à base de silicium, qui peuvent se révéler plus coûteux et complexes à produire à large échelle.