Auvergne-Rhône-Alpes veut devenir la capitale du traitement de surface par lasers

11 décembre 2019

Laser femtoseconde © Manutech USD

Le groupement public/privé Manutech USD, installé à Saint-Étienne, propose aux entreprises des compétences uniques en matière de procédé laser. Sa maîtrise des lasers femtosecondes en particulier lui procure une compétence unique sur le marché industriel du traitement de surface. Une technologie que Manutech USD souhaite désormais rendre plus accessible aux entreprises de la région.

Les lasers à impulsions ultracourtes produisent des impulsions extrêmement rapides, de l’ordre du millionième de milliardième de seconde (femtoseconde), et à la précision micrométrique. Ils peuvent ainsi sculpter n’importe quelle matière, bois, acier, ou encore plastique, sans risquer de les chauffer. Ces caractéristiques leur permettent de donner diverses fonctions à une surface, comme la rendre hydrophobe par exemple, ou autonettoyante. Sans surprise, les industries automobiles et aéronautiques ont été les premières à étudier les bénéfices de cette technologie. Safran s’intéresse par exemple aux lasers femtosecondes de Manutech USD pour développer des surfaces anti-givre.

Naissance d’un écosystème autour des lasers
Les premiers travaux sur les lasers femtosecondes ont été menés dans les années 1990 par le laboratoire Hubert Curien, unité mixte de recherche du CNRS et de l’Université de Saint-Étienne, qui fait figure de pionnier de cette technologie en France. A partir des années 2000, un écosystème régional se forme autour du laboratoire.

« Nous avons décidé de nous voir tous les lundis soirs,
nous formions une sorte de think tank »

Philippe Maurin-Perrier

L’Institut d’optique, qui s’installe à Saint-Étienne en 2003, le Cetim, l’Enise, Centrale Lyon ou encore l’industriel HEF Group (voir encadré), entre autres, commencent à s’y intéresser. Un groupe structuré émerge peu à peu. « Nous avons décidé de nous voir tous les lundis soirs, pour créer ensemble des feuilles de route. Nous formions une sorte de think tank », explique Philippe Maurin-Perrier, PDG de HEF Group. Le petit groupe veut donner plus de visibilité aux technologies de texturation de surface par laser, et souhaite, à terme, répondre à des appels à projets. Quelques années après, l’objectif est doublement atteint, puisque le groupe, baptisé Manutech, est labélisé Equipex et Labex en 2011.

« Le GIE a fonctionné parce que nous n’avions pas de contrat »
La dotation permet à Manutech, devenu Manutech USD (Ultra-fast Surface Design), de se doter de deux premières plateformes de laser femtoseconde. Très vite, les acteurs de l’Equipex choisissent de se structurer en groupement d’intérêt économique (GIE) pour faciliter les échanges avec les industriels. « C’était une sorte de spin-off de l’Equipex » explique Renaud Marin-Sidgwick, chargé de développement au sein de Manutech USD. L’équipe avance vite, et ne s’embarrasse pas de procédures administratives. Aucun contrat n’est signé par les membres du GIE en matière de partage de la propriété intellectuelle. « Le GIE a fonctionné parce que nous n’avions pas de contrat » soutient Philippe Maurin Perrier. Son objectif : diffuser la technologie au plus grand nombre. Le GIE propose tout de suite des prestations aux entreprises non membres du GIE.

« Manutech propose une machine de fabrication additive
sur laquelle est installé un laser femtoseconde
dédié à la finition des surfaces,
c’est très intéressant pour nous »

Olivier Delcourt, Safran Tech

Le succès est au rendez-vous. Manutech collabore avec plusieurs grands groupes, comme Airbus ou Safran Electronics & Defense, et aide à la création de start-up deeptech. C’est le cas de Keranova, qui a développé des lasers femtosecondes robotisés pour l’ophtalmologie, en se servant notamment des équipements de Manutech USD. Cette start-up a levé 24 millions d’euros en septembre dernier. Aujourd’hui le GIE gère sept plateformes technologiques, contre deux à ses débuts. Les compétences en impression 3D apportées par l’Enise devraient attirer de nouveaux clients. « Manutech propose une machine de fabrication additive sur laquelle est installé un laser femtoseconde dédié à la finition des surfaces, c’est très intéressant pour nous » explique Olivier Delcourt, directeur du pôle matériaux et procédés chez Safran Tech, et directeur de l’IRT M2P.

La région veut rendre accessibles les lasers aux PME/ETI
Attirer les PME sur son site fait partie des défis de Manutech USD. Le GIE a déjà créé il y a quelques années le programme « Welcome Pack », un programme financé par la Métropole et la Fondation pour l’innovation du Crédit Agricole Loire et Haute-Loire, pour permettre aux PME de venir tester gratuitement leur idée. Aujourd’hui, Manutech USD espère attirer de nouveaux clients grâce à la construction du Campus numérique à Charbonnières-les-Bains prévu pour septembre 2020.

Son projet PLATE SURFA, consistant à créer une plateforme technologique dédiée aux lasers et à l’impression 3D, et porté avec Centrale Lyon et l’Enise, a été retenu à l’issue de l’appel à manifestation « Usine de recherche et d’innovations » de la région. La plateforme proposera aux entreprises de venir tester leurs projets et de profiter des équipements. « Ils bénéficieront d’une sorte d’échantillon gratuit » explique Bertrand Nicolet, vice-président de Manutech USD. Avec comme objectif final d’orienter ces acteurs vers les sites de Centrale Lyon, ou de Manutech USD pour engager des projets de recherche de plus grande ampleur. Manutech USD participe également avec la Région à la création d’un « catalogue de services », destiné à aider les PME à trouver le bon partenaire et le bon financement pour innover. Le Campus numérique s’est fixé comme objectif d’accompagner 300 entreprises et former 1 000 salariés en cinq ans.

Philippe Maurin-Perrier, acteur clé de l’écosystème stéphanois
Le dirigeant du groupe stéphanois HEF Groupe a joué un grand rôle dans l’émergence de Saint-Étienne comme un acteur de pointe du traitement de surface. Le spécialiste de « l’ingénierie de surface » s’intéresse dès les années aux années 2000 aux travaux du laboratoire Hubert Curien. En 2009, Philippe Maurin-Perrier décide même d’installer les locaux de HEF Groupe dans l’ancienne Manufacture de Saint-Étienne, pour être le voisin du laboratoire. Le groupe suit également l’aventure d’Impulsion, une spin-off du laboratoire spécialiste du laser femtoseconde, avec laquelle il collabore. Puis HEF porte la candidature de Manutech pour le label Equipex et Labex.
Acteur clé de plusieurs projets de recherche collaboratifs, l’entreprise s’est dotée il y a deux ans d’une nouvelle plateforme de tribologie (science des frottements), cofinancée avec la région. Philippe Maurin-Perrier est également le président du pôle de compétitivité CIMES, résultat de la fusion du pôle Mont-Blanc Industries et ViaMéca.


Ce qu’il faut retenir :

  • Saint-Étienne s’est dotée de compétences uniques en matière de traitement de surface par lasers 
  • Les entreprises auront la possibilité de venir tester les lasers femstosecondes à partir de septembre 2020 à Charbonnières-les-Bains
  • La région prépare un catalogue des aides et acteurs disponibles pour accompagner les PME

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