Marta Valenciano (Epiconcept) : « Nous espérons que le virus SARS-CoV-2 sera plus stable que celui de la grippe »
Marta Valenciano, directrice du département épidémiologie d’Epiconcept ©Epiconcept
Utiliser les outils de surveillance de la grippe, pour lutter contre le coronavirus, c’est l’idée qu’a eue l’entreprise Epiconcept.
La société française spécialisée dans la collecte et l’analyse des données médicales – coordonne depuis 2007 des réseaux européens d’évaluation de certains vaccins dans le cadre des projets I-MOVE. Ce programme s’appuie sur trois réseaux complémentaires :
-Un réseau de médecins généralistes (Réseau Sentinelles par exemple)
-Un réseau d’hôpitaux
-Des laboratoires de référence (Institut Pasteur par exemple)
Epiconcept se spécialise sur la grippe
C’est en 2015 qu’Epiconcept renforce ses compétences en surveillance de la grippe, lorsque l’Union européenne lui confie les rênes du projet I-MOVE + (Influenza – Monitoring Vaccine Effectiveness). Les financements permettent à l’entreprise d’intégrer notamment un nouveau réseau d’hôpitaux.
Le projet, d’une période de trois ans, veut tester l’efficacité des vaccins contre la grippe en Europe. Le programme permet de recruter près de 15 000 personnes atteintes de grippe, dans 16 pays européens.
Epiconcept agrège et analyse les données des différents réseaux, et fournit une évaluation de l’efficacité des vaccins contre la grippe.
▶️L’objectif final est d’aider les autorités de santé à définir leurs recommandations d’usages et d’éclairer sur les recherches complémentaires nécessaires.
Le travail est d’autant plus crucial que chaque année, le virus de la grippe mute, avec des souches virales chaque fois différentes
[Epiconcept finance son propre réseau. À la fin de ce projet européen I-MOVE +, en 2018, Epiconcept décide de financer elle-même l’activité du réseau hospitalier, afin d’assurer la continuité de son activité.]
De la grippe au Covid-19
À la tête du réseau I-MOVE, Epiconcept a répondu très vite à l’appel à projets Covid-19 lancé par l’Union européenne fin janvier. « Comme nous avions déjà le réseau, nous nous sommes dit que nous étions capables de nous adapter vite pour contribuer à la surveillance et à la recherche dans le cadre du Covid-19 », explique Marta Valenciano, directrice du département épidémiologie d’Epiconcept.
Son expérience est une force au moment de déposer le dossier, d’autant que les délais pour préparer le dossier sont extrêmement courts. « Nous avons été capables de déposer le projet parce que nous avions I-MOVE », confirme Marta Valenciano.
Le projet I-MOVE-Covid-19 a ainsi été sélectionné. Il est financé à hauteur de 2,5 millions d’euros, pour une durée de 27 mois.
Son objectif : améliorer la connaissance du virus, grâce à trois axes :
-La surveillance de l’épidémie
-Les travaux de recherche
-L’évaluation des vaccins développés une fois sur le marché
Le projet européen s’appuie bien évidemment sur le réseau I-MOVE, et implique une vingtaine de partenaires, issus de 10 pays différents. Epiconcept est en charge le volet recherche du projet.
« Nous espérons que le virus SARS-CoV-2 sera plus stable que celui de la grippe »
Marta Valenciano
Priorité : le risque pour le personnel soignant
Les premiers vaccins ne sortiront pas avant des mois. Toutefois, Epiconcept a déjà un rôle crucial à jouer. « En février, nous n’étions pas encore dans une pandémie, nous avions proposé de faire évoluer la partie recherche en fonction de la situation épidémiologique », explique Marta Valenciano.
Aujourd’hui, alors que plusieurs pays partenaires font face au pic de l’épidémie, l’entreprise a orienté ses premiers travaux sur les facteurs de risques de sévérité, et sur les facteurs de risques pour le personnel de santé.
Dans les mois à venir, cette surveillance sera d’autant plus importante que les acteurs de la santé connaissent encore mal ce virus, et ses possibles mutations. « Nous espérons que le virus SARS-CoV-2 sera plus stable que celui de la grippe » indique Marta Valenciano.
Epiconcept : Une indépendance revendiquée
Epiconcept fait partie des entreprises qui se sont mobilisées très vite pour participer à l’évaluation des vaccins contre le Covid-19. À la différence d’autres groupes, l’entreprise revendique son indépendance. L’entreprise, basée à Paris, tient à se démarquer des consortiums d’évaluation des vaccins financés eux-mêmes par des laboratoires pharmaceutiques.
« D’autres consortiums évaluant des vaccins travaillent avec des laboratoires pharmaceutiques. Nous pensons que les producteurs de vaccins ne peuvent pas participer à leur évaluation une fois mis sur le marché, car il peut y avoir conflit d’intérêt » rappelle Marta Valenciano. C’est pour cela que l’entreprise ne travaille qu’avec les financements d’acteurs publics provenant de la santé, pour les projets ayant trait à l’évaluation des vaccins.
Ce qu’il faut retenir :
- Epiconcept est en train d’évaluer les facteurs de sévérité du Covid-19 auprès du personnel soignant
- Epiconcept sera en charge de l’évaluation des futurs vaccins contre le Covid-19
- Les données récoltées permettront d’adapter les vaccins aux possibles mutations du virus