Stockage de données sur ADN : les start-up françaises dans la course

15 juin 2022

©Biomemory

Le CNRS a récemment inauguré le PEPR exploratoire consacré au stockage des données sur molécules, notamment l’ADN. Ce programme de vingt millions d’euros sur sept ans doit soutenir et coordonner les recherches des laboratoires tricolores, et les épauler concernant la création de start-up issues de leurs résultats. L’Hexagone en compte déjà plusieurs. Une opportunité pour plusieurs secteurs industriels, alors que les premières offres commerciales sur ce secteur pourraient arriver d’ici à la fin d’année.

La capacité à stocker des données atteint ses limites. Au rythme actuel, le monde aura besoin, en 2025, de capacités de stockage de 175 zettaoctets, soit 175 milliards de disques durs d’un téraoctet. Elles étaient de 33 zettaoctets en 2018. Or cette croissance exponentielle risque de rendre la consommation énergétique des data centers insoutenable. Elle dépasse désormais celle du secteur de l’aviation. Elle aura également un impact économique fort. Les data centers sont passés de 500 000 à 8 millions en 10 ans dans le monde.

Parmi les options alternatives de stockage, l’ADN apparaît comme une des plus prometteuses. L’ADN présente l’avantage de stocker davantage d’informations, sans consommation d’énergie, sur de petits volumes. « Nous pourrions stocker toutes les données mondiales dans l’ADN de 20 personnes », explique Stéphane Lemaire, chercheur au laboratoire de biologie computationnelle et quantitative (Sorbonne Université/CNRS). Encore faut-il savoir synthétiser de l’ADN et coder/décoder l’information en code quaternaire, compatible avec l’ADN. Et, le tout, à un rythme, un coût et une qualité compétitifs. Le codage d’un MO sur ADN revient actuellement à 1000 dollars. Le gouvernement a ainsi lancé en début de mois un PEPR (Programmes et équipements prioritaires de recherche) Exploratoire portant sur le stockage des données sur ADN synthétique et polymères non-ADN.

Le PEPR MoleculArXiv est doté de 20 millions d’euros. Il fédère une vingtaine de laboratoires positionnés sur ce sujet, et compétents sur différents domaines, comme la synthèse chimique, la microfluidique, le traitement du signal ou, encore le séquençage. Le PEPR financera des projets sur quatre axes scientifiques : les technologies de synthèse de polymères ADN et non-ADN, le stockage, le stockage sur polymères synthétiques et le stockage moléculaire. L’objectif est de réduire le coût de la synthèse, et d’accélérer la vitesse de l’écriture. « Elle est pour l’instant de cent secondes par bit unique. Nous voulons atteindre une seconde par bit», indique Marc Antonini, coordinateur du programme et chercheur au Laboratoire d’informatique, signaux et systèmes de Sophia Antipolis (I3S) de l’Université de Côte d’Azur et du CNRS. Des actions seront ensuite engagées en matière de transfert de technologies.

La France compte plusieurs start-up, issues de laboratoires de recherche publique, positionnées sur le stockage de données par ADN. La plus ancienne est DNA Script, qui développe une imprimante à ADN. Imagene, leader mondial du marché, met au point des capsules pour stocker l’ADN. Marc Antonini et la chercheuse du laboratoire I3S Melpomeni Dimopoullou s’apprêtent à lancer Pearcode, spécialiste de bio-informatique du secteur. « Nous proposons des solutions de codage/décodage sur ADN, auxquelles nous ajoutons une offre de DNA Data center ». Nos solutions seront adaptées à toutes les technologies de synthèse d’ADN. » explique Melpomeni Dimopoullou. Enfin, une des start-up les plus originales est Biomemory. Portée par le chercheur Stéphane Lemaire, elle conçoit une nouvelle solution de synthèse par voie biologique. Cette méthode, qui se distingue des solutions chimiques et enzymatiques, a notamment l’avantage de permettre de créer des copies à bas coût.

Le PEPR permet de positionner la France aux côtés des autres acteurs de ce marché, comme l’Allemagne, le Royaume-Uni ou les États-Unis. La France compte d’ailleurs s’appuyer sur cette démarche pour pousser la création d’un FET Flagship au niveau européen. Il pourra aussi donner les moyens aux start-up d’accélérer leur développement. « Notre stratégie consiste à travailler sur l’automatisation et la miniaturisation du système, et nous lançons aussi de nouvelles POC », poursuit Stéphane Lemaire. Une démarche bienvenue alors que les premières solutions commerciales pourraient arriver aux États-Unis. Le cofondateur de Pearecode compte ainsi créer officiellement l’entreprise en fin d’année. Le fondateur de Biomemory compte de son côté également aller sur le marché d’ici la fin d’année, en visant le marché NFT, et celui de la contrefaçon dans un deuxième temps.

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