Gaussin s’associe à l’Université de Lille sur le port autonome

10 septembre 2020

Test du robot porte-conteneurs, dans le cadre du projet Vasco (Véhicule Automatisé Supervisé pour COnteneurs)

Le constructeur de véhicules portuaires Gaussin Manugistique se lance sur le marché mondial des ports autonomes avec ses robots porte-conteneurs. Une performance qu’il doit à sa collaboration avec le laboratoire CRIStAL, de l’Université de Lille, ainsi qu’avec Centrale Nantes, dans le cadre du projet PSPC baptisé Vasco. Les origines de ce succès remontent toutefois aux travaux de recherche de CRIStAL, dans le cadre du projet européen InTraDE, il y a plus de dix ans.

Points à retenir :

  • L’Université développe des robots porte-conteneurs depuis le lancement du projet européen InTraDE, en 2009
  • Gaussin Manugistique commercialise cette année ses premiers robots
  • Le pôle de compétitivité i-Trans a joué un rôle central dans l’industrialisation des résultats

Les ports du nord de l’Europe sont actuellement confrontés à une double problématique : la hausse du trafic maritime et la nécessité de réduire les émissions de CO2. Pour répondre à ces deux défis, le projet Vasco (véhicule automatisé supervisé pour conteneurs), projet PSPC (projets structurants des pôles de compétitivité), lancé en 2016, avait pour but de développer un système de gestion de véhicules autonomes pour fluidifier et de réduire la consommation énergétique des systèmes existants. Ce programme s’est achevé fin 2019 et a permis de positionner Gaussin Manugistique et BA Systèmes comme les leaders de l’automatisation des ports. Une réussite qui est, avant tout, le fruit d’une collaboration scientifique.

L’Université de Lille en pointe sur les robots portuaires autonomes

Le développement de robots portuaires autonomes est aussi complexe que de faire rouler un véhicule autonome en pleine ville. « Un port, c’est un environnement urbain, avec ses quais, ses systèmes, ses grutiers, sa logistique… et il faut compter avec les douanes, les autorités portuaires. C’est un écosystème complexe », explique Rochdi Merzouki, du Centre de recherche en informatique, signal et automatique (CRIStAL) de l’Université de Lille.

Jusqu’ici, l’introduction de technologies d’automatisation dans les ports se heurtait à une question de coûts et de flexibilité. « Le port de Rotterdam avait déjà développé le premier AGV (automated guided vehicle), autoguidé sur le sol grâce à des capteurs. C’est efficace, mais c’est très coûteux. Cette technologie n’a pas pu être généralisée sur des ports petits ou moyens, comme fluviaux » ajoute Rochdi Merzouki. Cette solution est, en outre, peu flexible : « Les AGV qui suivent un marquage fonctionnent, mais dépendent de la disposition du port, il faut changer les infrastructures. Et s’il y a une panne, les AGV peuvent être bloqués. »

Les acteurs de Vasco ont inversé la problématique : ils ont développé un concept de robots qui s’adaptent à leur environnement, et non l’inverse. « La difficulté rencontrée dans un port, c’est qu’il y a des piles de conteneurs qui changent tout le temps. Nous avons élaboré un système qui se met à jour régulièrement et qui partage l’information avec les autres véhicules », détaille Simon Klein, directeur technique chez Gaussin. Les porteurs du projet Vasco ont mis au point trois AIV (autonomous intelligent vehicle) capables de se repérer dans leur environnement, grâce, notamment, à la télédétection par laser (lidar).

Un projet européen pour les TRL 0 à 6

Achevé fin 2019, le projet peut déjà être considéré comme un succès commercial, alors que Gaussin Manugistique a suscité l’intérêt de plusieurs ports internationaux. Si le projet Vasco a permis de faire sauter les derniers verrous technologiques, son succès repose en partie sur les travaux de recherche lancés par le CRIStAL, à la fin des années 2010.

À cette époque, Rochdi Merzouki, à la tête du laboratoire CRIStAL (CNRS/Université Lille/Centrale Lille), constate la faible automatisation des grands ports d’Europe du Nord. Il monte, au sein de son laboratoire spécialisé dans le traitement du signal, l’automatique et les systèmes logistiques, un projet européen de recherche et de développement de véhicules portuaires autonomes qui peuvent s’adapter à leur environnement. Le projet européen InTraDE (Intelligent transportation for dynamic environment) voit ainsi le jour en 2009.

Lorsque je présentais nos robots didactiques aux industriels, ils avaient tendance à sourire. Quand je leur ai montré notre robot de 20 tonnes, ça leur a donné des idées

Rochdi Merzouki

Les six partenaires européens partent de zéro. L’objectif est de développer des technologies jusqu’à un niveau de TRL 6. Le projet, financé à hauteur de 7,3 millions d’euros, dont 3,7 par le fonds Feder, a permis de résoudre les problèmes technologiques majeurs, de développer un vrai prototype et de le tester en conditions réelles. « À l’époque, fin 2008, lorsque je présentais nos robots didactiques aux industriels, ils avaient tendance à sourire. Quand je leur ai montré en conditions réelles, en 2013, notre robot de 20 tonnes, ça leur a donné des idées », se souvient Rochdi Merzouki.

Le projet s’achève fin 2014. Reste à trouver un partenaire industriel capable de financer les phases de TRL de 6 à 8. « Nous avions essayé d’anticiper la possibilité de valoriser ces travaux, mais nous n’avions pas trouvé d’industriel, indique le chercheur. Heureusement, le pôle de compétitivité i-Trans a joué le tôle de courroie de transmission, et nous a mis en relation avec des industriels.  Ils ont considéré qu’il convenait bien pour un projet PSPC, car il était très structurant », ajoute Rochdi Merzouki.

Les pôles comme intermédiaires

I-Trans, avec les pôles Véhicule du futur et Images & Réseaux, a fait jouer son carnet d’adresses. Cela finit par convaincre Gaussin Manugistique, spécialiste des véhicules portuaires, et BA Systèmes, expert des systèmes automatiques. Le format est parfaitement adapté aux objectifs de préindustrialisation. « À la différence du projet européen, les partenaires étaient plutôt restreints et complémentaires, le projet était plus ciblé », expose Rochdi Merzouki.

Vasco est une “concaténation” de briques technologiques

Rochdi Merzouki

Le financement de Vasco, à hauteur de 15 millions d’euros, a consisté à financer le développement de trois robots conteneurs. Ils sont testés sur le site d’Héricourt et sur la plateforme multimodale Delta 3-Dourges. Les travaux consistent à intégrer les résultats du projet InTraDE. « Vasco est une “concaténation” de briques technologiques », décrit Rochdi Merzouki. Les industriels adaptent toutefois le projet aux besoins du marché. Par exemple, Gaussin Manugistique utilise une technologie du CEA acquise en 2012 auprès de l’organisme de recherche pour électrifier les robots-conteneurs. Gaussin rend également les robots plus rapides : 35 km/h contre 15 km/h habituellement.

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