Ilias Iliopoulos (ANR) : « Nous attendons que les objectifs scientifiques des chaires soient ambitieux et innovants »

26 février 2024

Ilias Iliopoulos, président du comité Chaires Industrielles de l’ANR ©PIMM – Arts et Métiers

L’appel « Chaires industrielles » de l’ANR est ouvert jusqu’au 27 mars. Créé il y a plus de dix ans, ce programme est l’outil le plus complet proposé par l’ANR pour favoriser les collaborations entre un laboratoire de recherche et une ou plusieurs entreprises. Associant recherche scientifique d’excellence et formation, il permet de structurer une relation de long terme entre ces acteurs, dans une grande diversité de secteurs. Le président du comité d’évaluation scientifique des projets pour l’ANR, Ilias Iliopoulos, directeur de recherche au CNRS, spécialiste des matériaux polymères, et fort d’une expérience dans la recherche privée et publique, revient pour POC Media sur les avantages de ce dispositif.

POC Media. Comment présenteriez-vous les avantages d’une chaire industrielle pour un laboratoire et une entreprise ?

Ilias Iliopoulos. L’une des missions de l’ANR consiste à stimuler des coopérations public-privé. Parmi les nombreux outils à sa disposition, le programme « Chaire industrielle » est peut-être le plus ambitieux. D’abord par le financement qu’il apporte. L’ANR contribue à hauteur de 500 000 € minimum au financement de ces chaires qui sont créées pour une période de 48 mois. L’entreprise s’engage à verser, au minimum, la même somme en numéraire. Ce dispositif est très intéressant pour une entreprise. Le financement d’une thèse Cifre s’élève à environ 200 000 €. Or, une chaire permet de financer plusieurs thèses, ainsi que d’autres actions de recherche et de formation. L’investissement est facilement rentabilisé. Depuis le premier appel, en 2011, nous avons financé 62 chaires industrielles, pour un budget moyen de 845 000 € par projet. À noter que la contribution de l’ANR peut aller jusqu’à 1 200 000 € !

Vous présidez le comité d’évaluation scientifique. Quels critères retenez-vous en priorité dans le choix des dossiers ?

Nous attendons d’abord que les objectifs scientifiques des chaires industrielles soient ambitieux et innovants. Ensuite, la chaire doit permettre au chercheur ou à la chercheuse qui soutient le projet, par ailleurs reconnu par ses pairs, de franchir une nouvelle étape dans ses travaux. Enfin, le projet doit aussi s’accompagner d’un volet formation, à travers le financement de thèses, mais aussi d’actions de formation au niveau du master et du postdoctorat.

En plus de ces trois dimensions essentielles, nous portons une attention particulière à l’impact socio-économique du projet (potentiel de valorisation, renforcement de la compétitivité), mais également à sa prise en compte de la parité et des objectifs de développement durable qui représentent des engagements importants pour l’ANR.

nous portons une attention particulière à l’impact socio-économique du projet

Ilias Iliopoulos

La maturité des technologies ou les secteurs concernés sont-ils des critères de sélection ?

Nous ne retenons pas les projets en fonction du degré de maturité des technologies du secteur. Les travaux des chaires peuvent porter sur des technologies à n’importe quel niveau de TRL. Dans la même logique, nous ne privilégions pas de domaine spécifique particulier. Les chaires peuvent toucher l’agronomie, les matériaux, la santé ou encore les sciences humaines et sociales.

Quel est le profil type de l’entreprise qui porte ou participe à une chaire industrielle ?

L’appel à projets intéresse et s’adresse en priorité aux grands groupes, mais certaines entreprises de taille intermédiaire peuvent aussi s’engager. Je rappelle que les chaires peuvent être portées par plusieurs entreprises, à la différence de certains autres programmes collaboratifs de l’ANR, comme le dispositif des laboratoires commun. L’ANR propose, en effet, différents programmes qui sont à la fois complémentaires et spécifiques, chacun ayant sa propre feuille de route.

Concernant les chaires industrielles, j’ajoute que les porteurs de projets partent rarement de zéro, et s’appuient souvent sur un lien durable noué entre l’entreprise et le laboratoire, parfois déjà matérialisé par une thèse Cifre.

Certaines filières industrielles sont-elles plus représentées que d’autres ?

Les domaines sont assez variés, mais nous avons reçu plusieurs projets, ces dernières années, dans le domaine aéronautique, dans l’énergie, notamment sur l’hydrogène, ou encore dans l’automobile et la santé. J’ajoute que nous avons validé l’année dernière une première chaire sur les SHS. L’appel « chaire » s’adresse à toutes les disciplines scientifiques.

Propos recueillis par Florent Detroy

Répondez à l’appel « Chaires industrielles »

La date limite de soumission des candidatures à l’appel à projets ANR « Chaires industrielles » est fixée au 27 mars 2024.

Pour plus d’informations, consultez l’appel ici

Ou écrivez à l’ANR : chairesindustrielles@agencerecherche.fr

Trois Chaires industrielles qui ont profité de l’appel Chaires industrielles

  • WinEsca

La Chaire industrielle WinEsca (2022 -) porte sur le développement de nouvelles solutions pour protéger les vignes de l’Esca, une maladie du bois de la vigne. Le projet vise à développer des méthodes de taille vertueuses, mettre au point des agents de biocontrôle pour une protection préventive, et évaluer les bénéfices économiques pour les viticulteurs et l’acceptation sociétale de ces solutions.

Lancée en 2022, la chaire est pilotée par l’Iprem (CNRS/UPPA), et regroupe l’Inrae, les Universités de Bordeaux et de Reims, ainsi que les entreprises Jas Hennessy & Co et GreenCell. Elle bénéficie d’un financement de 1200 k€ de l’ANR, 800 k€ de Jas Hennessy & Co et 400 k€ de GreenCell. Pour en savoir plus.

  • PERCEVAL

La chaire industrielle Perceval (2015-2020) porte sur l’amélioration des performances énergétiques et environnementales des moteurs aéronautiques, via l’analyse des processus physico-chimiques impactant ces performances, afin de notamment satisfaire les directives Acare 2050. Les porteurs de la chaire ont notamment utilisé une combinaison des fonctionnalités d’expérimentation, de modélisation et de simulation numérique.

La chaire, qui a fonctionné entre 2015 et 2020, a réuni le laboratoire Coria (CNRS/INSA de Rouen/Université de Rouen) et Safran. La chaire a été financée à hauteur de 920 k€ de l’ANR, a permis de former cinq jeunes docteurs et a donné lieu à la publication de nombreuses publications. Pour en savoir plus.

  • SILVERSIGHT II

La chaire industrielle Silversight II (2018-2023) portait sur le développement de solutions innovantes pour le diagnostic non invasif du risque et de la progression de la DMLA (dégénérescence maculaire liée à l’âge). Les résultats devaient permettre d’améliorer la prise en charge précoce de la maladie par des traitements individualisés de préservation de la vision ou par des changements de mode de vie (tabagisme, exposition à la lumière, etc.).

La chaire SilverSight II était portée par l’Institut de la Vision-Sorbonne Université, EssilorLuxottica et SNCF Innovation&Recherche. Financée à hauteur de 1050 k€ par l’ANR, la chaire a profité à plusieurs jeunes chercheurs (14 doctorants, 6 postdoctorants et 49 étudiants de master), et donné lieu à 57 articles scientifiques, 69 présentations invitées et 78 communications dans des conférences. Pour en savoir plus.

Retrouvez les autres actualités thématiques de poC média

Inscription Newsletter

Vous souhaitez suivre l'actualité des technologies deeptech ?

Recevez gratuitement une newsletter par semaine

Je m'inscris
Fermer